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La Politique Européenne de Voisinage en 2015: où en est-on?

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Le 25 mars 2015, la Commission Européenne et la Haute Représentante de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité Federica Mogherini ont publié leur rapport annuel d’évaluation de la mise en oeuvre de la Politique Européenne de Voisinage en 2014, ainsi que des rapports de suivi pays par pays contenant un bilan des relations entre l’UE et les pays partenaires pendant l’année écoulée et des recommandations pour l’année à venir. Ils feront l’objet d’un article par pays prochainement.

2014 a été une année très mouvementée pour le voisinage de l’Union Européenne. A l’Est, elle a été marquée surtout par la guerre qui rage dans l’Est de l’Ukraine, mais aussi par des développements positifs tels que la signature d’accords d’association avec la Géorgie, la Moldavie, et l’Ukraine elle-même. Au Sud, toute la région a été bouleversée par les atrocités croissantes perpétrées par Daech, par le terrorisme, par la situation dramatique de l’appareil étatique en Libye, par une résurgence du conflit israélo-palestinien, ainsi que par une série de tragédies liées à la migration en Méditerranée et liées à la traite d’êtres humains. Là aussi sont intervenus des développements positifs tels quels le succès de la transition démocratique en Tunisie et le resserrement des relations entre l’UE et le Maroc et la Tunisie.

Dans ce contexte difficile, le 25 mars 2015 la Commission Européenne et la Haute Représentante de l’Union Européenne (UE) pour les affaires étrangères et la politique de sécurité Federica Mogherini ont publié leur rapport annuel d’évaluation de la mise en oeuvre de la Politique Européenne de Voisinage (PEV) en 2014, ainsi que des rapports de suivi pays par pays contenant un bilan des relations entre l’UE et les pays partenaires pendant l’année écoulée et des recommandations pour l’année à venir. En raison de l’absence de programmes d’association ou de plans d’action pour l’Algérie, la Biélorussie, la Libye et la Syrie, aucun rapport de suivi n’a été rédigé pour ces pays.
La Haute Représentante Federica Mogherini a exprimé la volonté de l’Union, « dans cette période cruciale, […] d’intensifier sa coopération politique, économique et sécuritaire avec ses partenaires dans toute la région ». Le commissaire chargé de la politique de voisinage et des négociations d’élargissement Johannes Hahn a, de son côté, rappelé que la Politique Européenne de Voisinage est en cours de révision suite à la publication d’un document de consultation en vue de sa réforme. (date limite pour la consultation : 30 juin 2015)

Mise en oeuvre de la PEV en 2014 : une vue d’ensemble

La première partie du rapport de mise en oeuvre de la Politique Européenne de Voisinage est consacrée aux thèmes de la démocratie et de la bonne gouvernance, dont la promotion est l’un des objectifs de cette politique. La situation des pays voisins en matière de transition démocratique est très nuancée et hétérogène. Si d’une part il y a eu des avancées majeures en Tunisie, en Maroc, en Moldavie et en Géorgie, la transition démocratique de l’Ukraine a été fortement entravée par le conflit en cours dans le pays. Comme le remarque le rapport, dans ce pays la réforme constitutionnelle a été retardée, et la Commission de Venise du Conseil de l’Europe a estimé qu’elle n’est pas complètement conforme aux normes internationales. De l’autre côté, en Egypte, en Azerbaïdjan et en Biélorussie on a assisté à une stagnation voire une détérioration de la situation en matière de respect des droits de l’homme et de la démocratisation. Un cas à part c’est la Libye, où les mauvaises conditions de sécurité ont menacé l’intégrité même de l’Etat.
Pour ce qui concerne les élections, il y a eu des votations conformes aux normes internationales en Tunisie, Ukraine, Israël et Moldavie, tandis que les élections dans les régions ukrainiennes de Donetsk et Louhansk et en Crimée ont été jugées illégales et illégitimes.
En matière de liberté d’expression et d’association et de droits des minorités, on observe des changements positifs en Tunisie, Liban, Maroc et Moldavie, alors qu’aucun changement n’est intervenu en Azerbaïdjan, Biélorussie, Egypte et Palestine. D’après le rapport, la situation des droits de femmes et des enfants « demeure problématique dans la plupart des pays ».
L’indépendance du secteur judiciaire s’est améliorée en Tunisie, Maroc, Liban, Jordanie, Moldavie et Ukraine, alors qu’elle n’est pas respectée en Azerbaïdjan et Egypte. La torture et d’autres mauvais traitements continuent à être appliqués dans plusieurs pays.
En ce qui concerne la société civile, on constate une évolution « plutôt négative » de la situation des organisations de la société civile dans le voisinage, en raison principalement de mesures législatives visant à en limiter les activités.

La deuxième partie du rapport concerne la coopération politique et en matière de sécurité. En générale, on observe en 2014 une « croissance exponentielle » des problèmes liés à la sécurité dans la région. Les menaces à la sécurité émanent surtout du terrorisme (y compris l’activité de Daech), de la situation en Libye, des conflits de longue durée, de la criminalité organisée et des flux migratoires clandestins.
Le rapport rappelle ensuite que l’Union Européenne est présente dans la région du voisinage à travers plusieurs missions PSDC : une mission d’observation en Géorgie, une mission de police dans les territoires palestiniens, des missions d’assistance à la frontière en Moldavie, Ukraine, Libye et au point de passage de Rafah à Gaza, ainsi qu’une mission de conseil sur la réforme du secteur de la sécurité civile en Ukraine. En outre, la situation en Syrie a requis « le plus important effort humanitaire jamais entrepris par l’UE ». Dans le cadre des opérations PSDC, le rapport salue la participation de la Moldavie et de l’Ukraine à un certain nombre de missions de l’UE, notamment au Mali, en Somalie et en République Centrafricaine.
En matière de conflits de longue durée, le dialogue entre la Géorgie et ses régions séparatistes a été récemment remis en cause par un traité d’alliance entre la Russie et l’Abkhazie. De même, la Transnistrie a récemment réaffirmé ses ambitions d’autonomie accrue.

La troisième partie du rapport est consacrée à l’intégration économique. L’année 2014 a vu la signature d’accords d’association prévoyant des zones de libre-échange approfondi et complet avec la Géorgie, la Moldavie et l’Ukraine, qui sont maintenant en train d’être mis en oeuvre. Ces accords de nouvelle génération établissent « les relations contractuelles les plus ambitieuses à ce jour avec le partenaires relevant de la PEV ». Dans le cas de l’Ukraine, malgré des améliorations dans les relations commerciales bilatérales, la situation macroéconomique a amené les autorités du pays à adopter des restrictions commerciales. L’Arménie et la Biélorussie ont, de leur côté, signé un traité d’adhésion à l’Union Economique Eurasienne promue par la Russie. Pour ce qui concerne le voisinage Sud, l’UE est en train de négocier un accord de libre-échange approfondi et complet avec le Maroc, alors que le processus préparatoire pour la négociation d’un tel accord est en cours avec la Tunisie, et la Jordanie. Enfin, des évaluations des incidences sur le développement durable de ce type d’accord sont en cours pour l’Egypte.
Certains pays tels que le Maroc, la Tunisie et l’Ukraine ont procédé à un alignement de leur législation sur les règles et les normes de l’UE dans le secteur des transports. De même, l’intégration des pays voisins dans le marché intérieur de l’énergie de l’UE s’est poursuivie, avec notamment une coopération dans le domaine de la sûreté nucléaire.
Enfin, en matière de recherche et innovation, Israël et la Moldavie ont signé avec l’UE des accords d’association dans le cadre du programme Horizon 2020.

Ensuite, le rapport se penche sur les contacts interpersonnels, les migrations et la mobilité, en observant qu’en 2014 les flux des voyageurs et migrants légaux entre le voisinage et l’UE ont constamment augmenté.
En matière d’éducation, la coopération entre l’UE et ses partenaires s’est accrue par le biais de programmes tels que Tempus, Erasmus Mundus et Jumelage électronique. En 2014, de pays comme l’Azerbaïdjan, la Moldavie, l’Ukraine, l’Egypte, la Jordanie et la Tunisie ont adopté des reformes visant à améliorer la qualité de l’éducation. De l’autre côté, l’afflux de réfugiés en Syrie a posé un défi aux systèmes éducatifs de la Jordanie et du Liban.
En ce qui concerne les migrations et la mobilité, des partenariats pour la mobilité ont été signés avec l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Géorgie, la Jordanie, la Moldavie, le Maroc et la Tunisie. Ensuite, des négociations pour un accord de réadmission et de facilitation de délivrance des visas est en cours avec la Biélorussie. Concernant le Liban, un dialogue sur la migration, la mobilité et la sécurité a été lancé. Enfin, un régime d’exemption de visa a été mis en place avec la Moldavie.
Toutefois, en raison des bouleversements dans le voisinage méridional, les flux migratoires clandestins n’ont pas cessé d’augmenter. L’action de l’UE sur ce volet a visé essentiellement au renforcement des systèmes de justice pénale en matière de trafics et des capacités en matière de contrôles aux frontières.

Enfin, en matière de coopération financière, l’UE a mis en place un mécanisme de financement propre à l’accord de libre-échange approfondi et complet (150 mln € pour la période 2015-2017). De plus, un fonds régional d’affectation spéciale a été constitué afin d’apporter une aide renforcée en réaction à la crise syrienne à l’échelle régionale. Enfin, l’UE a octroyé, par le biais de procédures accélérées, une aide macrofinancière et une assistance technique à l’Ukraine.

Les dimensions régionales : le Partenariat Oriental et le Partenariat pour la Démocratie et la Prospérité Partagée

Dans le voisinage Est, à côté de l’approfondissement des relations bilatérales, le Partenariat Oriental (lancé en 2009) envisage également une dimension multilatérale qui se déroule essentiellement à travers une série de plateformes thématiques qui assurent un forum d’échange et de coopération et à travers cinq « initiatives phares ».
Dans le cadre de l’initiative phare sur le contrôle intégré des frontières, un nouveau projet de capacity-building géré par Frontex (l’agence de l’UE chargée de la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures) a été lancé en 2014. Sa mission c’est essentiellement de contribuer à une formation spécialisée dans les pays du Partenariat Oriental et à la lutte contre la corruption.
Deuxièmement, concernant l’initiative phare sur la prévention des catastrophes naturelles ou d’origine humaine, un réseau régional d’agents de liaison a été établi. On a assisté également au lancement de la deuxième phase d’un projet visant à renforcer le mécanisme de protection civile dans les pays partenaires en matière de prévention et réponse aux catastrophes, en vue de rapprocher progressivement ces pays aux standards de l’UE.
Ensuite, le programme « East Invest » a vu le jour dans le contexte de l’initiative phare consacré aux petites et moyennes entreprises (PME). Pour ce qui concerne les trois pays qui ont signé des accords de libre-échange complet et approfondi avec l’Union Européenne, un fonds spécifique, comme on l’a évoqué, a été établi.
Concernant l’initiative phare pour la promotion de la bonne gouvernance environnementale, le programme régional « Vers un système de partage d’informations sur l’environnement » (SEIS) a continué à être mis en oeuvre. De plus, l’UE a financé des projets régionaux en matière de qualité de l’air e de mise en oeuvre de protocoles des Nations Unies liés à la pollution de l’air dans certains pays.
Enfin, dans le cadre de l’initiative phare sur l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables, une initiative a regroupé plus de 100 villes afin d’améliorer l’efficacité énergétique au niveau local.
Le Partenariat Oriental prévoit également des institutions multilatérales : une assemblé parlementaire regroupant des membres du Parlement Européen et des Parlements des voisins de l’Est, un forum regroupant des organisations de la société civile de l’UE et des pays partenaires, et une conférence des régions et des autorités locales.
L’Assemblée Euronest a adopté, lors de sa dernière session ordinaire qui s’est tenue à Bruxelles le 29 mai 2014, des résolutions en matière d’enjeux de sécurité régionale, d’harmonisation des législations économiques nationales, de sécurité énergétique et de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale.
Le Forum de la Société Civile a produit une série de déclarations et recommandations aux gouvernements des pays partenaires et à l’UE et a développé également des projets régionaux. Sa dernière réunion a eu lieu à Batumi (Géorgie) en novembre.
Enfin, la conférence des régions et des autorités locales (CORLEAP) s’est réunie pour cinq sessions plénières au cours de 2014 et a discuté de questions de réforme de l’administration publique, de décentralisation régionale et locale et de coopération territoriale.

En ce qui concerne le voisinage sud, comme l’observe le rapport, la région demeure une de moins intégrée au monde. La région présente toutefois des initiatives multilatérales telles que l’Union pour la Méditerranée, le Dialogue 5+5 (Forum de la Méditerranée Occidentale), et voit se développer une coopération de l’UE avec la Ligue Arabe et l’Organisation de la Coopération Islamique.
Dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée, trois réunions ministérielles ont eu lieu, concernant notamment la coopération industrielle, l’économie numérique, le changement climatique et l’environnement. De plus, 13 projets ont été approuvés et 8 ont été mis en oeuvre au cours de 2014.
En ce qui concerne le Dialogue 5+5, qui envisage une coopération en matière de sécurité, eau, énergie, mobilité académique, business networks et société civile, une réunion des ministres des affaires étrangères et le second Forum Economique ont eu lieu en mai à Lisbonne.
La coopération avec la Ligue Arabe en 2014 a porté à la fois sur des thématiques transversales telles que les droits de l’homme et le terrorisme et sur des thèmes politiques tels que le processus de paix au Moyen-Orient, la Syrie et la Lybie.
Enfin, en matière de coopération avec la société civile, l’UE a mis en place des mécanismes pour un dialogue régional structuré entre la société civile, les autorités et l’Union Européenne visant à compléter et à renforcer les mécanismes existants au niveau national.

Pour conclure, nous rappelons que deux évènements importants auront lieu dans les prochains mois dans le contexte de ces initiatives régionales. En particulier, le 21-22 mai aura lieu le quatrième sommet biennal du Partenariat Oriental à Riga. En outre, une réunion ministérielle se tiendra à Barcelone le 13 avril afin de consulter les voisins méridionaux dans le cadre de la révision en cours de la Politique Européenne de Voisinage.

Giulia Bonacquisti

 

Pour en savoir plus :

 – Communication de la Commission sur la mise en oeuvre de la Politique Européenne de Voisinage en 2014
(FR) http://eeas.europa.eu/enp/pdf/2015/joint-communication_fr.pdf
(EN) http://eeas.europa.eu/enp/pdf/2015/joint-communication_en.pdf

– Regional report: Eastern Partnership (EN): http://eeas.europa.eu/enp/pdf/2015/enp-regional-report-eastern_partnership_en.pdf

– Regional report: Partnership for Democracy and Shared Prosperity with the Southern Mediterranean Partners (EN): http://eeas.europa.eu/enp/pdf/2015/enp-regional-report-southern-mediterranean_en.pdf

– Rapports de suivi pays par pays (EN) : http://eeas.europa.eu/enp/documents/progress-reports/index_en.htm


Classé dans:Droit à la liberté et à la sûreté, Elargissement, LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES, MIGRATIONS ET ASILE, RELATIONS EXTERIEURES

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